
Comment le #BlueMonday s’est-il emparé des marronniers ?
Qui se cache derrière le hashtag #BlueMonday ? Quelle est l’origine de cette journée devenue incontournable dans nos marronniers ? On surfe ou on surfe pas ?
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It’s the most depressing time of the year… 🎶 La météo est tristoune, les fêtes finies, nos bonnes résolutions déjà oubliées et voilà que le Blue Monday fait surface ! Le Blue Monday (ou « lundi bleu » en français) qui fait référence à l’expression anglaise to feel blue, soit « avoir le cafard en français », serait le « jour le plus déprimant de l’année ». Il survient le troisième lundi de janvier pour nous hanter et s’invite chaque année dans les marronniers des médias et des marques, sur le web et les réseaux sociaux. Pourtant, saviez-vous qu’il s’agissait en réalité d’une vaste opération marketing ?
Une opération marketing montée de toute pièce
Le Blue Monday se résume en une équation imaginée par le psychologue irlandais Cliff Arnall. Contrairement à ce que l’on pourrait peut-être croire, elle n’a pas de valeur scientifique. Elle aurait été commandée par l’agence Porter Novelli pour le compte de la compagnie britannique Sky Travel en 2005 dans l’objectif de vendre des billets d’avion après les fêtes de fin d’année.


Les marques à l’assaut du Blue Monday
Rapidement, marques et médias s’emparent du mouvement au même titre que le Black Friday et surfent sur la vague pour remonter le moral des internautes.
Le Blue Monday représente une opportunité idéale pour les marques de relancer la consommation après les fêtes de fin d’année et de miser sur la vente en ligne. Ainsi, nos feeds se parent de bleus et de publications sponsorisées nous invitant à sourire… et cliquer !
Hashtags associés à #BlueMonday sur Twitter sur hashtagify.me :

À l’égard des community managers, le Blue Monday peut s’apparenter à un jour supplémentaire de publication sur le calendrier éditorial, et combler une période parfois creuse. C’est donc une nouvelle chance de renforcer le lien avec les communautés en véhiculant un message à la fois utile et positif. La recette est la même pour tout le monde : un wording qui met du baume au cœur + un visuel bleu + une touche d’originalité et on publie !
Des fake news au fact checking…
Les médias aussi n’hésitent pas à se saisir du Blue Monday afin d’attirer toujours plus des nouveaux lecteurs en grand nombre. Jusqu’en 2018, des centaines d’articles étaient publiés à foison : “Blue Monday : comment éviter la déprime ?”, “5 conseils pour palier au Blue Monday”, etc. Vive le marketing de contenu ! Soudainement, les journalistes devenaient psychologues le temps de 2 500 mots. Point positif : une nouvelle journée pour sensibiliser à la santé mentale mise sur le devant la scène.
À l’ère du fact-checking, les médias cherchent de plus en plus à débusquer les fausses informations et gagner en crédibilité. Une pratique journalistique davantage démocratisée depuis la loi française contre la manipulation de l’information et les fake news du 20 décembre 2018. Dès lors, on observe une nouvelle prise de position de la part des journalistes qui dénoncent le Blue Monday alors qualifié d’« arnaque » ou de « supercherie ». Pour autant, ces articles continuent de faire surface le jour du Blue Monday qui lui, fait encore la une des médias.
Articles référencés en page 1 de la recherche « Blue Monday » sur Google en janvier 2021 :

Essayez par exemple de rechercher les termes “Blue Monday” sur lemonde.fr, vous trouverez des articles qui donnent crédibilité au Blue Monday et d’autres qui le dénoncent… Qui croire ? Pourquoi des prises de position aussi contradictoires ? Ainsi, il convient de s’interroger sur la crédibilité à donner aux médias aujourd’hui.
De l’opération marketing au marronnier…
Opération réussie ? Était-elle vouée à durer dans le temps et marquer l’histoire de la communication ? Si nous n’avons pas de visibilité sur les retombées de la campagne pour Sky Travel, on peut clairement affirmer que l’opération menée par l’agence Porter Novelli est une réussite !
Encore aujourd’hui, le Blue Monday compte parmi les principaux sujets de conversation des internautes : 180 000 tweets contenaient le hashtag #BlueMonday en 2016 et le hashtag #BlueMonday s’est retrouvé une nouvelle fois en tendance sur le réseau social Twitter en 2021. Sur Instagram, on ne dénombre pas moins de 880 000 publications sur le hashtag #BlueMonday.


Sur Google, on remarque évidemment des pics de recherche pour les termes « blue monday » chaque année en janvier, depuis 2007. Des pics de plus en plus importants au fil des années, encore en 2019. Plus de 10 ans après, le Blue Monday s’est exporté sur la toile à l’international, aux États-Unis, en Amérique du Sud comme en Europe bien qu’il reste majoritairement utilisé en Grande-Bretagne.
Évolution de l’intérêt pour la recherche « blue monday », sur Google Trends :

Ces chiffres surprenants illustrent la pleine réussite de cette campagne qui s’est implantée parmi les journées mondiales au même rang que la Journée Internationale des Droits des Femmes ou la Journée Mondiale du Climat.
Au final, faut-il continuer à s’emparer du #BlueMonday ? À l’heure où la transparence et l’authenticité priment sur les réseaux sociaux en 2022, est-il toujours pertinent de suivre la voie d’une campagne purement marketing et d’un hashtag vu et revu ? Communiquer autour d’une opération promouvant le voyage en avion, et donc ne prenant pas en compte les enjeux écologiques actuels, fait-il réellement sens pour votre marque aujourd’hui ? Telles sont les questions à se poser avant de vouloir surfer sur la vague.